« Ce n’est pas raisonnable de pisser dans l’eau qu’on boit ».
« Les choses n’ont de valeur que celle qu’on leur invente ».
C’est d’un bon roman d’aventure dont je vais vous parler aujourd’hui, de la puissance de la fiction.
Un homme d’affaire, Gabriel, pilote un petit avion privé et survole l’Amazonie, territoire qu’il détruit sans s’en préoccuper parce qu’il est PDG d’une compagnie (premier groupe mondial exploitation minière).
Les aras multicolores se prennent dans les réacteurs, il s’écrase en pleine forêt, son destin est détourné.
Un accident et deux mondes vont se confronter.Celui tout d’abord de cette tribu, les Yacous qui n’a jamais eu aucun contact avec l’homme blanc et qui vit comme il y a dix mille ans à l’ère de la mondialisation.Ils sont huit, limite à laquelle le groupe peut subvenir à ses besoins : il ne faut pas surcharger le cercle.
Ils ont 57 mots pour désigner les différentes nuances de vert mais aucun pour parler du profit.Le mot « homme » se décline en trois versions : sur pied, sans mot, enracinés.
Ils vivent en osmose avec la nature : la notion de valeur marchande n’existe pas, tout se prélève après avoir demandé l’autorisation et s’être fait acquitté. Ils vivent en harmonie avec les éléments.Il n’y a pas d’ailleurs : seul existe ce qui les entoure et seul le présent compte. Un cercle entoure la tribu : frontière matérialisée par une boucle de fleuve qu’ils ne peuvent pas franchir. Leur légende leur demande de ne pas sortir de ce territoire. (L’histoire nous dira pourquoi…)
Celui de Gabriel qui, couvert de boue et de sang, réduit à une « chose » va être jeté dans la fosse aux cochons sauvages et devoir prouver aux Yacous qu’il est bien un homme.Tous ses arguments qui lui ont permis de réussir dans la vie n’ont aucune valeur car les indiens ont une autre vision du monde. Le voici immergé dans un monde chamanique et initiatique. Pascal Manoukian nous dit ainsi le monde.
Ce roman est une réflexion sur notre rapport oublié à la nature, notre connexion à la nature. Il évoque l’essentiel et donne un sens à notre présence sur terre car l’homme se perd. Il redonne également une valeur au langage, aux mots qui font l’humanité et qui permettent de réfléchir à ses conduites, ses actes.
C’est captivant, envoutant. Une belle expérience de lecture !
Le rôle donné aux femmes par cette tribu est à souligner et le passage sur l’enfantement est un bel exemple de vie.