« l’Histoire se fait au plus près des êtres, elle influence les vies comme les mains modèlent l’argile »
« Les grands moments de l’histoire sont la consigne de nos souvenirs personnels ».
Et bien on peut dire que ce récit est foisonnant !!! Et ce fut un régal d’autant que j’ai ouvert les pages de ce roman alors qu’on fêtait les 40 ans de la première élection de tonton en mai 81 !
Dans Nature Humaine, Serge Joncour aborde une multiplicité de thèmes et nous amène à faire l’inventaire de nos souvenirs personnels.
De la canicule de 76 à la tempête de décembre 99, il nous entraîne dans la spirale infernale du progrès où le paleron et le collier font place à la viande hachée surgelée, au côté d’une famille d’agriculteurs dans le Lot.
Dans ce récit il est question de transformation, de détonation, de fascination et de peur.
Alexandre est celui qui reste, il est celui qui se sacrifie : un choix visionnaire ?
Il sera otage de ses terres et va s’éprendre de Constanze qui rêve de dévorer le monde.
Le militantisme et les escapades citadines pour rejoindre ses soeurs happées par la ville, amènent Alexandre et cette jeune Est-allemande au parfum de Patchouli à les faire se rencontrer alors que tout les sépare.
Outre cette histoire d’amour, nous voici partis pour une échappée de la fin du siècle dernier. Tout y est : l’élection de Mitterrand et le symbole de la rose empoignée, Tchernobyl, le Mammouth qui écrase les prix (symbole de la grande distribution et de ses conséquences), le minitel, les cassettes, l’arrivée du téléphone, la vache folle, l’Erika, le maïs transgénique, les hormones, la chute du mur, l’approche du bug de l’an 2000, et une play-list qui fait appel aux réminiscences. Toutes ces actualités sont subtilement insérées dans l’intrigue.
Sur trente ans, Joncour déroule les évènements à travers lesquels les personnages évoluent : ils tentent d’agir sur le monde afin d’éviter la construction d’une centrale, d’une autoroute, que ce siècle soit un vrai Naufrage (tel que l’avait détaillé le 1erécologiste René Dumont lors de sa candidature en 1974 ou prédit tous ces hippies anti néo-libéraux).
Ce roman socialo-politico-ecolo d’amour nous parle de la mondialisation du sens de la lutte, de la solitude, du progrès, oui mais à quel prix ? C’est également une peinture du temps : celui qu’il faut pour s’aimer, pour construire, prendre des décisions.
J’ai aimé ce livre qui m’a fait traverser les trente premières années de ma vie et m’a fait faire une pause face à cette accélération et à tous ces dérèglements. Une pause dans cette nature, ce monde rural, et m’ont rappelée ces instants qui ont marqué mon enfance.
C’est à lire!!! un délicieux moment.