«Je suis l’enfant seul au cordon ombilical cisaillé à l’épée, assoiffé de lait, pourtant la tête noyée dans le sein de sa grand-mère. Je ne sais pas si la lune bleue ou grise, si les vagues de l’Atlantique veulent engloutir toute la côte ouest, affamées de terres à inonder ou si les forêts profondes du Sud-Ouest peuvent se révolter contre ces terres d’assignations et envahir Bamako. Mais je veux être une fine goutte de mer ou une fine herbe insignifiante, que personne ne surprendrait à exister ostentatoirement. »
Quel excellent texte parsemé de poésie dans lequel l’auteur, Diadié Dembélé, pratique un exercice linguistique prodigieux.
Dans ce très beau premier roman, l’auteur bâtit l’histoire d’un jeune garçon, Hamet, autour de la question de la langue.
Le « Taboussi » aime ouvrir son frigo linguistique et pavaner avec cette langue française de manière extravagante. Mais à Bamako on parle le soninké et le bambara entre autre. Insolent, pratiquant l’école buissonnière et oubliant sa langue maternelle il exaspère sa mère qui ne comprend pas et décide avec son père (résidant en France) d’envoyer Hamet dans son village, Yélimané, pour retrouver un rapport avec ses origines culturelles et religieuses, ses coutumes, ses superstitions. Grace à ces quelques mois initiatiques il redeviendra obéissant et soumis.
Il y rencontrera ses grands-mères, Mama Cissé et Mama Hata, participera aux récoltes, à la pêche collective, écoutera les légendes et assistera aux palabres auxquelles prendront part piqure-douce, mouche-silencieuse, quatre-pile et chapelet-court. Hamet par ce retour aux traditions va s’émanciper et grandir.
Diadié Dembelé aborde dans ce récit fertile et touchant la question identitaire et de liberté avec beaucoup d’humour.
Une lecture que je conseille vivement !« Écrire, déposer sur la feuille des mots que me dicte la petite voix qui hurle car elle ne sait pas encore sa langue, traumatisée par le « symbole » et fascinée par le gros-gros français ».
Une réflexion sur “Le duel des grands-mères.”