« Quelle valeur a la parole d’un vieillard dans un monde
comme le nôtre? Y a-t-il un sens à durer?
Le monde est obsédé par ça.
Occuper le plus d’espace.
Durer.
Faire triompher son camp.
Sa lignée.
Son Dieu.
“Raconte ces bombes qui tombaient
pendant que j’étais endormi,
Raconte-moi ces joues qui,
pendant que j’étais endormi,
se sont mouillées.”
Toute ma vie j’ai écrit parce que je souffrais de voir
se briser ce pays : celui des rêveries de l’enfant.
Toute ma vie, je l’ai passée à me battre pour conserver
le privilège de pouvoir respirer auprès de vous. »
On ne peut aborder les pépites de cette rentrée littéraire 2022 sans présenter ce bijou.
Ce roman poème qui se dit, qui se lit, ne peut que vous transporter.
C’est l’histoire d’un vieil homme, poète, Mahmoud, en Syrie.
Tous les matins, muni de son masque et de son tuba, il nage dans les eaux de sa mémoire dans le lac el-Assad né de la construction du barrage de Tabqa en 1973 et s’immerge dans ses souvenirs, sa maison d’enfance, ses émotions et s’adresse à son premier amour, Sarah.
Dans cette matrice métaphorique où est englouti le passé, Mahmoud trouve une paix intérieure.
A la brutalité, la dureté du présent, au contexte de guerre s’oppose la délicatesse, l’amour du vivant, la poésie.
Antoine Wauters à travers son poème en vers libres, dit une réalité sans violence, et interpelle.
Il rend la parole à toutes ces victimes et leur confère une dignité.
Ce texte dénué de toute colère aborde la barbarie autrement et en toute simplicité.
Si vous êtes en train de vous procurer vos derniers achats de Noël, à offrir sans modération !!!!
Il devrait passer entre toutes les mains…
« Vieillir, c’est devenir l’enfant que plus personne ne voit.
L’enfant dont on dit qu’il a les cheveux gris.
Dont on attend des choses, promesses, gloires et
accomplissements, alors que tout ce qu’il souhaite.
c’est rester à jouer avec son bâton en regardant tomber la
pluie, les mains couvertes de boue.
Vierge de paroles et de tout clinquant.
Je suis vieux, Sarah-de-mon-cœur,
parce que j’ai sept ans tous les jours depuis sept
décennies, mais que personne ne le voit. »